À PROPOS

MISSION

Arts & ERE explore les relations entre l’éducation artistique et l’éducation relative à l’environnement. Comment l’éducation artistique peut-elle devenir une éducation relative à l’environnement et, inversement, comment l’éducation relative à l’environnement peut-elle nourrir l’éducation artistique ?

OBJET DE CE SITE INTERNET

Ce site a pour but de rendre compte d’initiatives pouvant inspirer la conception et la mise en œuvre de pratiques pédagogiques poursuivant simultanément les visées de l’éducation artistique et celles de l’éducation relative à l’environnement.

 

Ce site vise également la mise en relation de chercheurs, artistes, pédagogues et médiateurs culturels intéressés par l'intégration des questions socio-écologiques en éducation artistique.


PRINCIPES DIRECTEURS

Éducation relative à l’environnement


L'éducation relative à l’environnement (ERE) est un mouvement éducationnel qui prend naissance au début des années 1970 et dont les principes directeurs ont été définis par les États membres de l’UNESCO lors de la conférence de Belgrade en 1976. La définition officielle de l’ERE est la suivante :

 

L’éducation relative à l’environnement est conçue comme un processus permanent dans lequel les individus et la collectivité prennent conscience de leur environnement et acquièrent les connaissances, les valeurs, les compétences, l’expérience et aussi la volonté qui leur permettront d’agir, individuellement et collectivement, pour résoudre les problèmes actuels et futurs de l’environnement (UNESCO-PNUE, 1987).

L’ERE concerne la reconstruction du réseau des relations personne-société-environnement à l’échelle individuelle, communautaire et biosphérique. Le développement des personnes est ici tributaire d’un approfondissement du rapport à l’environnement dans ses diverses perspectives, qu’elles soient écologique, économique, politique, esthétique ou éthique. L’ERE vise donc l’émergence de sociétés créatives et harmonieuses fondées sur une éthique de la responsabilité et de la solidarité (Sauvé, 1997, 1998, 2009).


Trois perspectives complémentaires doit être considérées : 1) la perspective environnementale qui vise à préserver, restaurer et améliorer la qualité de l’environnement; 2) la perspective éducative qui vise à favoriser le développement optimal des personnes et des groupes sociaux en ce qui concerne leur relation à l’environnement; 3) la perspective pédagogique qui vise à promouvoir le développement d’une éducation plus adaptée à la réalité du monde actuel et aux besoins des sociétés contemporaines, dont la transformation sociale elle-même (Sauvé, 1997, p. 80).



Éducation artistique


L’éducation artistique est une part essentielle de l’éducation. Elle contribue au développement intégral des personnes par l’appréciation ou la pratique artistique (d’après Legendre, 2005).

 

L’art permet d’appréhender le réel à travers l’expérience esthétique, laquelle mobilise les sens, le sentiment, la subjectivité, l’intuition et l’imaginaire. Sur le plan curriculaire, l’esthétique est une forme de savoir aussi fondamentale que les mathématiques ou les langues pour le développement harmonieux de la personne. Chaque forme d’art explore une aire spécifique du rapport sensible au monde. Au-delà d’un affinement de la sensibilité esthétique, l’éducation artistique contribue à de multiples développements : créativité, ouverture culturelle, habiletés sociales, etc. (Bouchard-Valentine, 2007; Morel, 2011).

 

Dans les programmes d’études du système scolaire québécois, le domaine des arts est composé de quatre disciplines : arts plastiques, musique, danse et art dramatique (Québec, 2006). Il faut cependant garder à l’esprit que l’éducation artistique recouvre potentiellement toutes les pratiques artistiques, ces dernières se manifestant sous différentes formes suivant les cultures et les époques. Qui plus est, l’éducation artistique n’est pas confinée au système scolaire : elle peut avoir cours dans différents contextes d’éducation formelle, non formelle ou informelle (Melançon, 2019).



Arts & ERE*


Le maillage entre les arts et ERE n’est valide et pertinent que si les deux champs contributifs préservent leurs visées respectives, à savoir l’approfondissement du rapport à l’environnement pour l’ERE et l’approfondissement du rapport au sensible au monde, pour les arts. En effet, dans ce projet qui nous interpelle, les arts ne devraient, en aucun cas, être subordonnés aux visées de l’ERE. Les deux champs devraient plutôt s’enrichir mutuellement à travers une démarche inédite – qu’il reste à formaliser – favorisant leur entrelacement, voire leur fusionnement, tout en préservant leurs finalités propres.



1.  L’art, un creuset de redéfinition de notre rapport au monde

La contribution des arts à l’ERE ne peut être réduite aux seules esthétiques dites « vertes » ou « écologiquement engagées ». L’héritage artistique de l’humanité doit être considéré dans son ensemble, puisqu’il représente la plus formidable source de connaissances dont nous disposons pour comprendre l’expérience humaine dans sa relation au monde.

 

Beaucoup d'artistes contemporains abordent des questions environnementales dans leurs œuvres et certains adoptent même une posture ouvertement militante pour la préservation et la restauration de l’environnement naturel. L'art écologiquement engagé rejoint bien entendu les visées de l’ERE. Il serait toutefois réducteur de limiter les expériences esthétiques en ERE à ce courant, car plusieurs pratiques artistiques contemporaines interpellent la société sur des enjeux d’actualité qui nécessitent une redéfinition de nos rapports à soi, aux autres et au monde (Morel, 2020, 2013).



2.  L’art, une dimension incontournable d’une ERE holistique

C’est sans conteste sur le plan d’une éducation holistique que la contribution des arts à l’ERE est la plus singulière et la plus porteuse. Dans les théories contemporaines qui fondent les curricula scolaires, l’esthétique est en effet reconnue comme l’un des principaux modes de signification et d’appréhension du réel, au même titre que les mathématiques, les langues, les sciences ou la philosophie. Une conception holistique de l’ERE devrait donc intégrer la dimension esthétique du rapport à l’environnement pour favoriser chez l’apprenant des expériences significatives, ressenties dans les retranchements les plus intimes et subjectifs de son être.

 

Malgré plus de 50 ans d’un plaidoyer insistant et d’actions éducatives à petite et à grande échelle, le mouvement de l’ERE n’a visiblement pas encore atteint tous ses objectifs. Plus que jamais, l’actualité nous rappelle les agressions perpétrées contre la biodiversité et les écosystèmes à travers la planète. Le jeu dangereux auquel se livre l’humanité risque bientôt de rompre l’équilibre écologique actuel de la biosphère et d’entraîner le vivant dans un cycle de perturbations profondes dont les conséquences sont imprévisibles, mais sans aucun doute dramatiques. Les récents cris d’alarme lancés par des collectifs de scientifiques et des mouvements sociaux de par le monde sont peut-être les derniers appels à la raison avant le point de non-retour. Nous sommes maintenant placés devant l’impérieuse et urgente nécessité d’un changement drastique de nos modes de vie.

 

Cette toile de fond menaçante met en lumière la nécessité de recourir à des stratégies éducatives transformatrices opérantes, car les approches rationnelles et culpabilisatrices n’ont visiblement pas réussi à mobiliser les populations qui semblent même avoir développé, au fil du temps, une « résistance » aux messages de ce type. Il est d’ailleurs assez troublant de constater que, dans les pays développés disposant de systèmes d’éducation avancés, une partie importante de la population ignore encore ou même réfute les évidences scientifiques qui attribuent aux activités humaines les dérèglements du climat.



3.  L’ERE, une contribution à l’expérience esthétique

Si les arts peuvent enrichir l’ERE, cette dernière peut réciproquement enrichir la démarche de création artistique. En effet, une démarche pédagogique globale en ERE poursuit des objectifs généraux qui peuvent être regroupés en cinq catégories :

  1. Prise de conscience au sujet de l'environnement, des problèmes associés et du réseau de relations personne - société - environnement.
  2. Connaissances: acquisition de connaissances sur l'environnement, sur les problèmes associés et sur le réseau de relations personne - société - environnement.
  3. Attitudes et valeurs: développement d'attitudes et de valeurs favorables à l'optimisation du réseau de relations personne - société - environnement.
  4. Compétence :  développement d'habiletés relatives à la résolution de problèmes et à l'écogestion, dans la perspective du développement de sociétés viables.
  5. Participation : adoption de modes de vie personnels et exercice de l’action individuelle et collective favorable au réseau de relations personne - société - environnement. (Sauvé, 1997, p. 266)


Ces catégories d’objectifs favorisent l’acquisition de différents savoirs (savoirs, savoir-faire, savoir-être) qui peuvent être réinvestis dans la démarche de création artistique. En ce sens, l’ERE devient partie intégrante d’une démarche qui s’apparente à la recherche-création :


La recherche-création est une tendance en émergence dans le milieu de la recherche universitaire qui lie la pratique des arts et les sciences de l'art aux sciences interprétatives et aux sciences pures, afin de générer de nouveaux savoirs à travers des pratiques sociales, matérielles et performatives (Hexagram).


* Le texte de cette section est en partie adapté d’un éditorial initialement publié dans Éducation relative à l'environnement : Regards – Recherche - Réflexion [En ligne], vol. 14 no 1, mis en ligne le 15 septembre 2017, consulté le 05 octobre 2019. URL : http://journals.openedition.org/ere/2630


RECHERCHE

Arts & ERE s’inscrit dans le deuxième axe de recherche du Centr’ERE : Arts et créativité, creusets de transformation de soi et du monde.

 

Approfondissant les fonctions heuristique, critique et politique de l’art et du design de même que leur potentiel de mobilisation, l’AXE 2 se penche sur la contribution essentielle de l’éducation artistique à la reconstruction des rapports aux milieux de vie et à la nature. S’il ne récuse pas l’incontournable découpage en quatre disciplines (art dramatique, arts visuels, danse et musique), cet axe privilégiera les pratiques artistiques contemporaines qui abordent des questions socialement vives nécessitant une redéfinition de nos rapports à soi, aux autres et au monde. Beaucoup d’artistes réagissent aux enjeux d’actualité et, parce qu’elles sollicitent autant la perception, raison, le sentiment et l’imagination (Savoie, 2015), leurs œuvres offrent des points d’ancrage des plus fertiles pour le développement des compétences écocitoyennes (Morel, 2013). Par ailleurs, il faut reconnaître la contribution du design au développement d’une culture écologique innovante (Orr, 2004; Le Bœuf, 2015).

 

Les travaux abordent ici les questions suivantes : Quels sont les espaces de convergence axiologiques entre l’éducation artistique, l’éducation au design et l’éducation relative à l’environnement ? Quels courants et théories artistiques et de design favorisent un maillage fécond entre ces dimensions de l’éducation ? Au-delà de leur visée esthétique, de quelles manières les pratiques artistiques et de design peuvent-elles contribuer à la construction de l’identité écologique, au développement des relations d’altérité et à l’engagement citoyen ?


La prise en compte de la dimension esthétique et créative du rapport à l’environnement est peu couverte par la recherche en ERE, particulièrement en ce qui a trait à la précision des fondements théoriques : la littérature anglophone propose quelques travaux significatifs (comme ceux de Inwood et Ashwoth, 2018; Song, 2008), mais les perspectives francophones sont faiblement représentées (Bouchard-Valentine et Sauvé, 2017; Pruneau et coll. 2017). L’Équipe s’attardera à synthétiser les écrits existants, puis à cartographier et à analyser les pratiques porteuses en vue d’enrichir le corpus théorique.

 

À travers le projet Arts et ERE, nous souhaitons enrichir le champ théorique et pratique de l’ERE en braquant le projecteur sur le potentiel transformateur de l’expérience esthétique et créative en arts (Planche, 2018). Ici également, c’est la mise en contexte de l’apprentissage à travers démarche artistique – dont l’importance critique et politique est de plus en plus reconnue – qui retiendront notre attention.


CHERCHEURS RESPONSABLES


Maia Morel


Maia Morel est docteure en arts plastiques et sciences de l’art (2006, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), professeure à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT). Spécialisée dans la didactique des arts visuels au primaire et au secondaire, elle s’intéresse au rôle de l’art dans l’éducation. Ses champs de recherche couvrent plus spécifiquement les « éducations à » avec les multiples thématiques transversales que ces nouvelles formes d’éducation mettent en avant, dont l’éducation à l’environnement, l’éducation à la diversité humaine, et l’éducation au vivre ensemble. Elle est chercheuse associée au Centre de recherche en éducation et formation relatives à l’environnement et à l’écocitoyenneté.



Vincent Bouchard-Valentine


Vincent Bouchard-Valentine est professeur de pédagogie musicale au Département de musique de l’Université du Québec à Montréal. Spécialiste des fondements théoriques de l’éducation musicale scolaire, il a développé une expertise originale dans les modèles d’enseignement de la création sonore, notamment avec les structures sonores des frères Baschet et l’application pour iPad
fonofone du compositeur Yves Daoust. Il s’intéresse aux relations entre l’éducation musicale et l’éducation relative à l’environnement à travers une proposition inédite d’éco-éducation musicale. Il est chercheur régulier au Centre de recherche en éducation et formation relatives à l’environnement et à l’écocitoyenneté et à l’Observatoire interdisciplinaire de création et de recherche en musique.


RÉFÉRENCES


Blandy, D., et E. Hoffman (1993). Toward an art education of place.
Studies in Art Education, 35(1), 22-33, doi: 10.2307/1320835


Bouchard-Valentine, V. et L. Sauvé (dir.) Éducation relative à l'environnement : Regards – Recherche - Réflexion
[En ligne], vol. 14 no 1, mis en ligne le 15 septembre 2017, consulté le 05 octobre 2019. URL : http://journals.openedition.org/ere/2630


Graham, M. (2007). Art, Ecology, and Art education: Locating Art Education in a Critical Place-Based Pedagogy. Studies in Art Education, 48(4), 375-391.



Inwood H. et E. Ashwoth (2018). Re-imagining environmental education as artistic practice. In: Reis, G. & Scott, J. (Eds.) International Perspectives on the Theory and

Practice of Environmental Education: A Reader. Environmental Discourses in Science Education, vol 3. Springer, Cham.


Le Boeuf, J. (2015). Design et innovation sociale. Sciences du Design, 2(2)
 
https://www-cairn-info.proxy.bibliotheques.uqam.ca/revue-sciences-du-design-2015-2-page-88.htm


Melançon, Marie-Odile (2019). Institutions culturelles, jeunes et enjeux de transmission : représentations du rôle d’éducation aux arts et à la culture à Montréal. Mémoire de maîtrise inédit. Québec, Université du Québec, Institut national de la recherche scientifique, Maîtrise en études urbaines.


Morel, M. (2020). Arts plastiques et éducation relative à l’environnement : comment repenser une formation des enseignants engagée et critique? Actes du Colloque interuniversitaire sur la recherche en enseignement des arts (CRÉA), Université de Sherbrooke, Longueuil, Canada.


Morel, M. (2013). Réflexions d’enseignantes du primaire autour d’une œuvre d’art contemporain comme moyen d’éco-sensibilisation des élèves. McGill Journal of Education / Revue des sciences de l’éducation de McGill. Publication thématique Éduquer et former au vivre ensemble. Vol. 48, n° 1, p. 223-242. http://mje.mcgill.ca/issue/view/548


Morel, M. (2011). Vivre la Cré-activité. Réflexions sur l'éducation artistique en arts plastiques. Côte Saint-Luc, Québec : Éditions Peisaj, 165 p.


Orr, D. W. (2004). The Nature of Design: Ecology, Culture, and Human Intention. Publisher: Oxford University Press.


Planche, E. (2018). Éduquer à l’environnement par l’approche sensible : Art, ethnologie et écologie. Lyon : Chronique sociale.


Savoie, A. (2015). Des arts à l’école pour préserver le mode perceptif : l’équilibre cognitif de l’enfant créatif. Spirale. Revue de recherches en éducation, 56, 107-116.


Song, Y. I. K. (2008). Exploring Connections between Environmental Education and Ecological Public Art, Childhood Education, 85:1, 13-19, doi: 10.1080/00094056.2008.10523051.


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